Revue d’histoire intellectuelle

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De l’histoire du mouvement ouvrier révolutionnaire

vendredi 25 septembre 2015

Lectures

De l’histoire du mouvement ouvrier révolutionnaire
Paris, Nautilus-Éd. CNT-Région parisienne, 2001, 302 p.

GIANINAZZI (Willy)

Fruit d’un colloque international Pour un autre futur organisé par les anarchosyndicalistes de la CNT, cet ouvrage veut rappeler que l’alternative sociale ne peut faire l’économie de son histoire. Histoire militante, en l’occurrence bien documentée (avec bibliographie), qui va des débuts de l’AIT à l’apothéose de l’Espagne républicaine, en passant par la Fora argentine, l’Usi italienne, l’AIT fondée à Berlin, l’anarchosyndicalisme oublié du Japon et le syndicalisme révolutionnaire français confronté à l’émergence du pôle communiste.

Que choisissons-nous de retenir ? Que l’exil, fréquent pendant la seconde moitié du XIXe siècle, eut ses vertus : il a souvent permis aux militants révolutionnaires de se rencontrer et de se donner des bases organisationnelles internationales. Que les mouvements anti-autoritaires pourraient bien être considérés « comme la rencontre entre un projet politique de “minorités agissantes” et des convictions autonomes de larges secteurs ouvriers ». Qu’enfin, l’un des grands principes politiques de cette mouvance ouvrière a été celui de considérer comme capitales les modalités de fonctionnement organisationnel car elles ne pouvaient pas ne pas préfigurer la nature des relations sociales dans la société à venir. Mais, d’un point de vue des enseignements à tirer, c’est peut-être ici que le bât blesse. Car non seulement il a toujours été difficile de résoudre le dilemme démocratie (interne)/efficacité, mais l’anarchisme ne s’est guère distingué des autres courants du mouvement ouvrier par la mise en sourdine des querelles doctrinales intestines. Pour peu que notre affirmation soit fallacieuse, elle est inspirée par la lecture : le regard se porte davantage sur l’histoire des organisations (congrès, motions, scissions, etc.) que sur l’esprit qui traversait les luttes et agrégeait hommes et femmes bien au-delà des structures. Nous venons d’indiquer la limite de l’ouvrage (ou de l’anarchisme organisé ?). C’est pourtant de celui-là que nous tirons l’anecdote cocasse que voici : dans les premières années dix, lorsque tout le monde s’accordait pour enregistrer en Italie une poussée sociale de l’anarchisme, une voix s’éleva : « Mais où sont donc passés les anarchistes ? » Décalage qui ne serait pas sans quelque analogie avec la situation de l’après-68 où l’esprit de Mai était si mal incarné par les groupuscules de l’époque.


Cet article a été publié dans Mil neuf cent, n° 20, 2002 : Péguy et l’histoire, .
Auteur(s) : GIANINAZZI (Willy)
Titre : De l’histoire du mouvement ouvrier révolutionnaire : Paris, Nautilus-Éd. CNT-Région parisienne, 2001, 302 p.
Pour citer cet article : http://www.revue1900.org/spip.php?article77